David Malan,
mise en scène
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Portrait d’un artiste raté

Représentations

Théâtre du Grand Rond Toulouse (31)
J’ai un pouvoir d’inconséquence

Chronique de la première Dame de Saint Girons

Avril 2022,
David Malan et Armelle Sebire.

David Malan :
Chère Armelle, je te soumets mon poème du 8 mars pour participer au concours « Hommage aux Femmes 2022 » ouvert à tes élèves du Lycée des métiers François Camel de Saint Girons où je viens de finir mes ateliers théâtre.
J’ai mis 20% de fiction pour que ça soit plus joli, pour m’amuser, et pour me protéger.

Je pensais anonymiser, mais c’est d’abord ton poème, alors je te l’envoi comme ça. ​

Est-ce que tu veux rajouter des commentaires et des corrections dans le texte avant que je me lance dans des publications dans les revues de littératures internationales ?

Bises

David
PS. Il n’y aura pas de publication en revues de littératures internationales. Juste des potes et des directrices.teurs de théâtre que j’essaye de draguer.
PS. 2 J’espère qu’il n’est pas trop tard pour draguer le jury et gagner le concours.

Armelle Sebire :

Je cherche les 80% de réel. Malgré plusieurs relectures, il est difficile de déterminer la part de réelle et de fiction. Moi, Dame Courage en terre d’Ariège, j’ai tranché : tout est réel !
Je t’ai dit que je suis très touchée d’avoir mon propre poème ? ​Merci…
Tu parles à une prof surnommée « Barredefer » alors je ne vais pas me gêner pour les corrections !

 J’ai un pouvoir d’inconséquence !

Bein, t’as bien de la chance

 J’appelle tout le monde « petit chat » depuis deux semaines.
Je donne des ateliers dans un lycée.
Je suis à Saint Girons et au self les internes me souhaitent :  Bon appétit petit chat.

Mais au centre de cette histoire il y aura Armelle, Mme Sebire, petit chat.

C’est dans le cadre d’atelier théâtre et égalité filles-garçons.

[Ici imaginez le logo de la région Occitanie].

Ça s’appelle « Ta gueule gros chacal ! » ou « Bonjour petit chat »,

le but officiel c’est de passer de l’une à l’autre des expressions en moins de deux heures.

L’officieux, c’est d’imposer la tendresse comme norme des interactions dans la classe.

Or, ce n’est pas moi le centre de cette histoire,
celle qui est au centre c’est Armelle, Mme Sebire, petit chat.

J’aime la féminisation des noms mais j’adopte volontiers dans ce cas mon surnom masculinisé. 

Et ça tombe bien elle est au centre là, de la pièce.

Notre pièce polyvalente est faite pour la gym step up et les réunions relatives aux « rapports » et expulsions des élèves.

Armelle, profe de service et restauration, y danse, dans les bras de sa collègue,
qui squatte mon cours parce qu’elle m’a dit « qu’elle était timide et que ça l’aiderait peut-être le théâtre… »​

C’est mignon, si j’avais su, je l’aurais enlacée plus fort.

Elles slow dance devant les élèves.
Comme les élèves avant elles.
Et donc Armelle pleure.

À peine une larme. Un début de conjonctivite…

On entend une musique romantique islandaise.
On voit la scène finale de La Boum projetée derrière elles
Sophie Marceau regarde dans le vide accroché​ à son Jules.

Accrochée !

Armelle a un ex qui lui coule sur la joue.

Aucun ex n’aura le privilège de couler un jour sur ma joue !

La pièce est plongée dans le noir,
seule la projection fait des reflets.
Les élèves circulent autour du couple
en flashant des effets stroboscopes de leurs téléphones.

J’ai cru que j’étais rayonnante.

L’un d’elleux – Gabin-petit-con –

Gabin-mon-chouchou…

récite un poème d’amour, au micro, qu’une autre lui souffle.
Il rajoute des « petit chat » et des prénoms à la fin de chaque phrase,
comme je leur ai dit de faire.

Dire « je t’aime » à leur profe reste efficace.

Surtout dans un dessein présidentiel…  

Mais là on a changé de poème parce que c’était le huitième passage
et dorénavant les élèves récitent :

« Je ne t’aime pas petit chat
mais je t’aimais,
je ne t’aime pas Armelle. »

Dans le public les élèves stressent :
« La prof elle pleure. »
Et effectivement, je lève la tête, Armelle en est là, elle exagère. ​

C’était moi, justement, moi la meilleure élève de l’atelier.

Attention, Armelle est un bonheur en forme de fantasme,

Pléonasme.

elle a des jambes incroyables qui vont jusqu’au sol,
elle se travestie en Madame Sebire en 8 secondes,
passe de « Barredefer »
à « petit chat » en un tour de rein.

Tu m’as pas vu passer en Sexy Lady en 10.

Elle dispute sa grimace entre beauté et réclame pour la bêtise.
Son air coquin fait tremplin à ma connerie,
comme un appel à l’aide :
– Amen je suis sexy, mais please God que jamais le sourire ne cesse.

Pas la moindre répartie.

Armelle Sebire, la pleureuse au milieu de la salle polyvalente du lycée, est référente genre et égalité de son lycée des métiers François Camel à Saint-Girons. Elle a organisé ma venue et dix-huit autres projets pour le 8 mars, comme chaque année. Elle a tapissé le bâtiment d’affiches de sensibilisation. Il y a des photos d’Adèle Haenel partout. Mais quand elle pleure devant les élèves pour incarner la tendresse et le lâcher prise, là elle me gave.

Pardon petit chat.

Parce que là, on voit tous un ex qui coule sur la joue d’Armelle.

Pendant que ce petit con de Gabin récite en gloussant :

« J’aimais être tous les jours avec toi,
être avec toi,
j’ai aimé t’accompagner Armelle,
te suivre Armelle,
te voir petit chat,
te respirer tous les jours,
c’était avec un amour total que je t’aimais Armelle… »

Je dois m’accrocher à Gabin pour qu’il l’accompagne en douceur dans la tristesse afin que l’atelier « Ta gueule gros chacal… » ne se décline pas en tragédie.

14 personnes l’ont vu,
mais Armelle,
tout le long de mon séjour,
et plus tard encore au téléphone, me dira que c’est des conneries.
elle pleurait pas.

Madame Sebire ne dévoile jamais les secrets d’Armelle.

« A peine une larme, une fatigue ».

Bulle, ma chouchou, prend le relais de Gabin, récite les mots du poème de Tarkos :

« Je ne t’aime pas Armelle petit chat,
mais je t’aimais,
je ne t’aime pas »

Pendant que cet imbécile de Gabin se gratte les couilles au lieu de lui souffler son texte.

Bulle est un trésor en soi, une future Armelle, les profs se la dispute​ pour qu’elle choisisse leur filière.

Disputent
​Son sourire plein de fierté à la lecture de ce passage…

Tous les jours, Bulle entend qu’elle sera incroyable, si bien que quand je lui dis qu’actrice elle serait pas mal non plus, elle dit : « Je sais petit chat… C’est parce que j’ai la classe. »

20 minutes avant, Armelle s’est servie de mon atelier boum-romantique-dance-karaoké-bonjour-petit-chat pour danser avec l’élève contre lequel elle avait collé un rapport la veille.

Peut-être pourrions-nous proposer le procédé à l’Inspection Générale ?

Bien fait pour elle, maintenant elle chiale devant ses mioches. Elle chiale un ex qu’elle n’a pas.

[Un ex qu’elle n’a pas, je le rajoute après recherche. L’enquête qui a suivi auprès d’Armelle a prouvé qu’il n’y avait eu aucun ex douloureux récemment. C’est endroit de la nostalgie pour un ex que l’on a pas eu est connu des anthropologues, on parle alors d’exonostalgie pour le regret d’un temps que l’on a pas connu soi-même, une nostalgie de seconde main.]

J’adore être exonostalgique, merci de m’avoir permise de l’être.

Dame courage en terre d’Ariège, Armelle, au concert du samedi soir, était revenue sur son déni : elle n’avait pas pleuré, et d’ailleurs son divorce était une liberté retrouvée. C’est ce soir-là que nous apprîmes aussi que ce qui la faisait le plus rire au monde, c’était la tête des gens qui mangent quelque chose qu’iels n’aiment pas (plaisir de serveuse) en me tendant un chewing-gum au goût saugrenu.

​Mais tellement !

Je découvre qu’Armelle est espiègle, ment, n’a pas mal à son ex et mange des chewing-gum dégueulasses.

#barredefer

Bulle, la magnifique, est là pourtant au micro qui fait pleurer Dame courage :
« tu m’aimais beaucoup,
je ne t’aime pas,
pourtant tout mon amour était pour toi Armelle,
tant je t’aimais. »

Nous sommes le lundi 14, j’ai fait 248 slow avec les petits chats du lycée de Saint Girons. Bulle a roulé des galoches à toutes ses copines dès que j’avais le dos tourné, apparemment douée à beaucoup de chose.

choses

J’ai appris qu’Armelle avait téléchargé toutes les applications de rencontre du Sud Ouest sans les utiliser, pour qu’on lui lâche les ovaires. Elle n’a aucun ex qui lui coule sur la joue, « que dans mes rêves », elle dit, et plus tard elle me tendra son 06, écrit au marqueur rouge sur une serviette de bar alors que je l’ai déjà son numéro depuis un an et demi. ​

Elle est là la partie fictionnelle :
ce n’était pas sur une serviette de bar,
mais sur mon mouchoir plein de larmes.

Avant mon départ, je dîne avec le proviseur
au restaurant d’initiation des élèves.
Notre serveuse c’est Bulle,
Ô poème de vivacité,
qui nous sert nos quenelles de chantilly.

Je lui dis:
« Même quand tu rates, c’est beau, Bulle ! »

Je dois faire part d’une grande sériosité quelques instants : David, je crois que ça l’a marqué ces ateliers à Bulle, elle a changé.
Mais elle n’a toujours pas changé d’avis et refuse de poursuivre en service.

Elle rétorque en regardant son proviseur :
« Bon appétit les petits chats. »

s’éloignant,
souriante,
comme Armelle et Sophie Marceau : jamais riante,
toujours au bord,
le regard dans le vide, pensant au monde qui pour elle va s’offrir.

L’enseignement est une discipline de sédimentation.

Moi, je n’ai qu’un pouvoir d’inconséquence.

Ok, tu gagnes.
Le premier lot du concours, c’est une sodastream…